Autres églises préromanes des Asturies (2/2) 

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Église San Salvador de Priesca

Nous rappelons que nous n’avons pas visité cette église, de même que les deux suivantes. Les images 1 et 2 ainsi que le plan de l'image 3 nous montrent qu’il s’agit d’une église à plan basilical à 3 vaisseaux charpentés. Les murs gouttereaux du vaisseau principal sont portés par des piliers rectangulaires de type R0000 (image 4). Une galerie-porche la complète côté Sud. On est donc en présence d’une église très proche de San Salvador de Valdediós. La principale différence entre les deux églises, tient au fait que, à Valdediós, une voûte en plein cintre a pu être installée sur un vaisseau central plus étroit qu’à Priesca.

Les arcs sont outrepassés (image 5). Toujours sur l'image 5 ainsi que sur les images 6 et 7, on observe des fresques qui semblent apparentées à celles de la Santullano d’Oviedo.


Les images 6, 7 et 8 montrent l’intérieur de l’abside principale. La voûte en plein cintre est portée par une arcade posée sur des colonnes à chapiteaux. Ces chapiteaux ne portent pas de tailloir. En fait, le sommet du chapiteau est sculpté en forme de tailloir, mais il n’existe pas de pierre séparée indépendante du chapiteau. Nous préférons appeler « imposte » plutôt que « chapiteau » ce système à une seule pierre et appelons « chapiteau » un système à deux pierres, le chapiteau et le tailloir. Un tel changement de définition du mot peut sembler totalement arbitraire mais il y a à cela une raison. Nous avons constaté que dans l’art roman, le système à deux pierres était prépondérant alors que dans l’art préroman, comme c’est le cas ici, le système à une pierre semble le plus utilisé.


Datation de San Salvador de Priesca

Selon la page de Wikipedia (en espagnol) consacrée à cette église, d’après une inscription lapidaire l’église aurait été consacrée en 921. Mais la pierre aurait disparu.

Nous pensons qu’il y eu deux périodes de construction : la nef serait antérieure à l’an 700 (an 550 avec un écart de plus de 150 ans).

Les absides existaient sans doute à la même période mais, plus tard, après l’an 700, le chœur a été voûté après la pose de la colonnade et des arcatures qui en font le tour (an 850 avec un écart de plus de 100 ans).. La date de 921 pourrait donc correspondre à cette deuxième campagne de travaux.





Église Santo Adriano de Tuñón

Cette église présente les mêmes éléments caractéristiques que les églises précédemment citées : nef basilicale à trois vaisseaux charpentés, piliers de type R0000. On y trouve aussi les deux petites pièces situées de part et d’autre, faisant croire en l’existence d’un transept. Une différence notable cependant : il n’existe pas d’imposte au sommet des piliers et portant les arcs. Nous estimons, sans pour autant apporter de certitude, que ce type de pilier sans imposte est postérieur aux piliers à impostes débordant dans toutes les directions rencontrées dans la plupart des églises asturiennes précédemment décrites.


L'image 15 représente l’intérieur de l’abside principale avec une très belle claustra dont nous ne sommes pas certains qu’elle soit d’origine. Par contre, les peintures murales semblent bien être d’époque et de même composition que celles de la Santullano d’Oviedo (décors de petits disques sur l’encadrement de la baie).


Datation de l’église Santo Adriano de Tuñón

Comme pour l’église précédente San Salvador de Priesca, nous pensons qu’il y a eu deux périodes de construction, avec pour la première période la construction des murs de l’ensemble, et pour la seconde, le voûtement des absides.

Le site Internet Wikipedia donne pour date de fondation l’an 891 , « en présence de évêques de Coimbra, Iria Flavia, Astorga et Oviedo. ». Nous n’avons pas vu l’acte de fondation, mais nous savons que ces actes doivent être interprétés avec précaution : un acte de donation peut être rédigé pour une église construite depuis longtemps. La consécration peut être celle d’un autel ou de reliques, et non la célébration de fin des travaux.

Nos hypothèses de datation : an 650 avec un écart de 150 ans pour la construction de la nef ; an 850 avec un écart de plus de 100 ans pour le voûtement et les fresques du chœur.



Église San Pedro de Teverga

Comme l’église Santa Cristina de Lena étudiée ci-dessus, l‘église San Pedro de Teverga est située au pied des Monts Cantabriques dans un territoire qui devait être occupé autrefois par des tribus montagnardes (image 16).

Nous sommes en présence d’un édifice fort différent de la plupart de ceux précédemment cités. Cependant la présence de contreforts disposés en ordre régulier l’apparente à Santa Cristina de Lena, à Sainte Marie de Naranco et, dans une moindre mesure à San Miguel de Lillo (image 17).

Son plan (image 18) est celui d’une basilique à trois vaisseaux très allongés. Le vaisseau central repose sur des colonnes cylindriques alors que pour les autres édifices rencontrés, les piliers étaient à plan rectangulaire ou même carré. Certes, à Saint Miguel de Lillo, les piliers étaient cylindriques mais les bases et les chapiteaux étaient forts différents de ceux que l’on voit ici (images de 21 à 27).

Car c’est à notre connaissance la seule église des Asturies où l’on trouve des chapiteaux historiés.

Les rédacteurs de la page du site Wikipedia consacrée à cette église ne s’y sont d’ailleurs pas trompés. Ils l’ont estimée différente des autres en la datant du XIesiècle alors que la plupart des autres églises étaient datées du IXe siècle. Ils ont de plus estimé que cet édifice était un édifice de transition entre le préroman et le roman.


Nous ne savons pas où sont situés les chapiteaux des images 21 et 22. Peut être sont-ils indépendamment du bâti ? En tout cas, ils sont très anciens, peut-être paléochrétiens : orant et poissons pour le premier, quadrupède et croix pattée pour le second.

L'image 23 représente un homme entre deux quadrupèdes. L’homme porte une sorte de robe très évasée, en forme de « kilt », vêtement que nous avons rencontré à plusieurs reprises et que nous avons attribué (sans preuve certaine) aux wisigoths.

Les images 24 , 25, 26 sont celles d’un seul chapiteau vu « en déroulé ». On y voit encore des hommes en « kilt », un orant, un autre orant à cheval.

Bien que représentant le même type de scène, le chapiteau de l'image 27 se différencie de celui de l'image 26 par des détails.


Datation de l’église San Pedro de Teverga

Nous pensons que cette église, fort différente des précédentes, leur est postérieure. Nous estimons que les chapiteaux des images 23 à 27 sont relativement archaïques et les datons plus du Xesiècle que du XIesiècle. An 950 avec un écart de 100 ans. Cependant, la différence d’époque ne suffit pas à expliquer l’ensemble des différences. Il devait y avoir aussi une différence de peuples ou de religions.




Conclusions concernant l’ensemble des édifices préromans des Asturies


La plupart des 15 édifices préromans des Asturies décrits ci-dessus ont été datés du IXesiècle par les historiens. Or, nous avons constaté que les édifices suivants : la Santullano d’Oviedo, San Tirso d’Oviedo, Santa María de Bendones, San Salvador de Valdediós, Santianes de Pravia, Santiago de Gobiendes, San Pedro de Nora, San Salvador de Priesca, Santo Adriano de Tuñón, sont tous des basiliques à trois vaisseaux dont le vaisseau central est porté par des piliers de type R0000. Dans le chapitre datation de ce site consacré au premier millénaire, nous avons estimé que ce type d’église pouvait dater du VIeou VIIesiècle. Soit deux siècles avant le IXesiècle. On peut penser que notre évaluation est arbitraire. Mais elle est liée à l’évolution de l’architecture. La retarder de deux siècles compliquerait le problème au lieu de le simplifier.

Il apparaît donc que, bien avant la renaissance asturienne du IXesiècle, il existait des édifices en nombre suffisant pour témoigner de l’importance de cette région. Une région qui s’était peut-être déjà détachée de l’influence wisigothe au moment de l’invasion arabe.

On pourrait croire que, selon nous, il ne s’est rien passé après le début de ces invasions. En fait, il y a eu des constructions. Et non des moindres : San Cristina de Lena, Santa María de Naranco, la Cámara Santa d’Oviedo. Mais il y a eu aussi des agrandissements de bâtiments comme à la Santullano d’Oviedo (transept), à Priesca (chœur), à Tuñón (chœur).

Il reste quand même un problème. On est en effet surpris par le trop petit nombre de monuments romans en Asturies. Nous en connaissons seulement deux : la Cámara Santa d’Oviedo et l’église Sainte Marie de Valdediós.