Deux églises de Bruges : la chapelle Saint-Basile et l'église Saint-Donatien
La
chapelle Saint-Basile de Bruges
Nous n'avons pas visité cette église. Les images ci-dessous
ont été recueillies sur Internet.
La page du site Internet Wikipédia consacrée à la basilique
du Saint Sang nous apprend ceci :
« Historique : À
l'origine, il y avait une chapelle dédiée à Saint-Basile,
de style roman, érigée au début du XIIe siècle.
Au cours du même siècle, elle fut construite selon le
souhait du comte de Flandre d'alors, Thierry d'Alsace, qui
avait ramené la relique du Saint-Sang, car retrouvée en
Terre Sainte lors de la deuxième croisade. Cette relique
est ramenée de Jérusalem par Léonius de Furnes, aumônier
de Thierry d'Alsace, puis conservée en ces lieux depuis
1150. »
Selon Xavier Barral i Altet, auteur du livre Belgique
romane de la Collection Zodiaque
:
« La
chapelle Saint Basile était à l'origine une chapelle à
deux étages suivant la formule des chapelles et mausolées
palatins, construits depuis l'époque paléochrétienne et au
cours du Moyen-Âge et qui connaissent une vogue
particulière à partir du début de l'époque gothique
(Sainte Chapelle de Paris). Il s'agit en réalité, non
d'une crypte ou d'un édifice à deux étages, avec
communication intérieure, mais bien de deux chapelles
superposées, avec accès à la chapelle supérieure par un
escalier extérieur. [...]
La
chapelle romane est un édifice de petites dimensions, doté
de trois nefs séparées par des piliers cylindriques et
couvertes de voûtes d'arêtes, toutes de même hauteur, afin
de former un support pour la chapelle supérieure.
[...] »
Arrêtons nous à cette première partie du texte, pour
constater que son auteur nous affirme : « La
chapelle Saint Basile était à l'origine une chapelle à
deux étages suivant la formule des chapelles et mausolées
palatins, construits depuis l'époque paléochrétienne et au
cours du Moyen-Âge et qui connaissent une vogue
particulière à partir du début de l'époque gothique
(Sainte Chapelle de Paris) ». Il ne nous précise
pas ce qu'est cette formule et en quoi elle diffère des
autres chapelles ou églises dont bon nombre sont aussi à
deux étages, si l'on tient compte de l'existence d'une
crypte. Par contre, il donne comme survivance de ce modèle
celui de la Sainte Chapelle, elle aussi à deux étages, mais
chacune des nefs n'étant qu'à un seul vaisseau alors que la
nef primitive de Saint-Basile était à trois vaisseaux, du
moins dans sa partie basse. Mais il est possible que sa
partie haute, sans doute représentée sur l'image
1, ait
été aussi à l'origine à trois vaisseaux, si on interprète
les colonnades accolées aux murs latéraux comme restes des
colonnades qui supportaient le vaisseau central d'une nef
triple.
Datation envisagée
pour la chapelle Saint-Basile de Bruges : an 1000 avec un
écart de 100 ans.
Revenons à la suite du texte de Xavier Barral i Altet. Elle
concerne le tympan de l'image
3 : «
L'interprétation
de cette scène a fait couler beaucoup d'encre car le thème
est particulièrement proche des illustrations du Baptême
du Christ dans le Jourdain. Celui-ci est souvent
représenté sous la forme d'une cloche d'eau tandis que le
Christ, généralement jeune, cache sa nudité derrière les
flots. [...] La
colombe, figurant le Saint-Esprit, descend du ciel au
moment de l'administration du sacrement par saint
Jean-Baptiste. [...] Jusque
là, le relief se rapproche fortement de ces compositions
représentant le Baptême du Christ. Cependant à Bruges le
personnage figuré debout ne correspond pas à la
représentation traditionnelle de saint Jean. Sa tenue
épiscopale a fait penser que la scène pouvait se référer
au baptême de saint Basile par l'évêque Maximin.
[...] Cependant,
la représentation est si proche de celle du Baptême du
Christ que la ressemblance ne peut en aucun cas être due
au hasard. À travers l'illustration du Baptême de Basile
sous les traits de celui du Christ et la substitution du
Baptiste à un évêque, c'est toute la fonction épiscopale
qui se trouve magnifiée et le rôle de l'Église comme
continuatrice de l'Évangile qui se voit affirmé. Ce n'est
donc pas par maladresse que l'on a sculpté cette image,
mais bien accord avec un programme iconographique dense.
»
Nous sommes d'accord avec ce point de vue de l'auteur. Avec
la rectification suivante : c'est bien le Christ qui est
représenté. Car il est au-dessus des eaux, symbole de vie.
C'est bien l'évêque qui est représenté à la place de Saint
Jean. Il est là pour affirmer le pouvoir épiscopal et sa
fonction principale consistant à baptiser.
L'auteur estime qu'il s'agit d'une « œuvre
tardive ». Sans doute veut-il dire qu'elle se situe
dans l'art roman tardif de la fin du XIIe siècle.
Nous pensons le contraire. Dans les représentations tardives
des dessus de portes, il existe au moins deux éléments : le
linteau et le tympan. Lorsque nous voyons comme ici une
seule pièce telle que le tympan semi-discoïdal, ou un
linteau en bâtièr, et si de plus le nombre de voussures est
réduit et la porte relativement étroite, nous en déduisons
l’ancienneté du modèle.
L'église
Saint-Donatien (ou Saint-Donat) de Bruges
Toujours selon Xavier Barral i Altet,auteur du livre Belgique
romane de la Collection Zodiaque
: «
Évangélisé de bonne heure, Bruges était, durant le Haut
Moyen-Âge, constitué par deux noyaux : la fortification
comtale et le centre marchand. Le château comprenait la
résidence comtale proprement dite et une église collégiale
placée sous le vocable de saint Donatien. Le premier était
situé sur l'actuelle place du Burg, autour duquel s'était
installée l'agglomération marchande dès le Xe
siècle. La collégiale Saint Donatien fut, jusqu'à sa vente
en 1790, suivie de sa destruction, un monument très
important de la ville dans lequel de nombreux notables
s'étaient fait enterrer. [...]
Les fouilles entreprises sur le site en 1954-1955 ont
permis de retrouver la forme du plan de l'église préromane
sans doute édifiée dans la première moitié du Xe
siècle. Un octogone était entouré d'un déambulatoire à 16
pans. Une abside rectangulaire de petites dimensions
s'opposait à un avant-corps occidental massif. Il s'agit
d'un des meilleurs exemples d'édifices construits, d'après
le modèle carolingien d'Aix-la-Chapelle. L'extraordinaire
influence qu’exerça cet édifice est sensible à Saint-Jean
de Liège (édifice étudié sur ce site),
Saint-Pierre de Louvain (édifice non étudié sur ce
site) et
dans l'église Saint-Lambert de Muizen (édifice
étudié sur ce site). L'église
Saint-Donatien fut transformée à l'extrême fin du XIIe
siècle ou au début du XIIIe siècle en un
édifice roman à trois nefs. [...]
»
Nous complétons cette information par les images
4 et 5 montrant l'église avant les destructions de
la fin du XVIIIe siècle, les images
6, 7 et 8 des plans de fouilles et l'image
9 de la restitution du bâtiment au premier étage.
Les plans de fouilles ont été capturés sur l'ouvrage de
thèse présenté par Tine Rassalle à l'Université de Gand en
2007. Ce rapport est intitulé : L'église
préromane en Flandre : inventaire archéologique.
Malheureusement le texte de cet ouvrage est écrit en
flamand, langue que nous ne maîtrisons pas. Et le traducteur
automatique que nous utilisons se révèle très imparfait.
Commentaires sur le texte
ci-dessus
Nous retrouvons dans celui-ci quelques traits
caractéristiques au Haut-Moyen-Âge :
— Au cours du premier millénaire, les villes étaient
composées de quartiers distincts, parfois fortifiés. Ces
quartiers pouvaient être occupés par des groupes sociaux
(ethniques, religieux) différents. Les ghettos juifs du
Moyen-Âge pourraient être une survivance d'un de ces
quartiers situés à l'intérieur d'une même ville. Dans le cas
de Bruges, on apprend l'existence de deux quartiers, mais il
est possible qu'il y en ait eu plus. À cela il faut ajouter
qu'en mille ans d'existence, une ville peut changer en
créant de nouveaux quartiers ou en fusionnant d'autres.
— La ressemblance entre cette église et la chapelle palatine
d'Aix-la-Chapelle est ici évoquée. Nous voyons aussi
d'autres édifices d'Europe ayant le même profil : nef à plan
circulaire ou polygonal à deux étages avec noyau central.
Sur ce site, nous en dénombrons 27, et ce, sans compter ceux
que nous sommes en train d'identifier pour la Belgique et
les Pays-Bas. À remarquer qu'il en existe un autre dédié à
Saint-Donat ou Saint-Donatien : Saint-Donat de Zadar
(Croatie).
— Comme beaucoup d'autres historiens de l'art, M. Barral I
Altet ne se pose pas la question de l'existence de ces
édifices à plan centré. Nous pensons que ce seraient des «
parlements », c'est-à-dire des endroits où l'on se parle.
Des édifices politico-religieux car, à l'époque, le
politique et le religieux étaient intimement mêlés.
— Comment a été déterminée la datation : « dans
la première moitié du Xe siècle » ? Il
est possible qu'elle soit purement artificielle. Mais il est
aussi possible qu'elle ait été établie d'une manière
scientifique en analysant les troncs d'arbre découverts
durant les fouilles (image
8), par les méthodes usuelles de dendrochronologie
ou de recherche du C14. Cependant, ces méthodes aussi
affinées soient-elles, ne permettent pas toujours de dater
une construction (le bois trouvé à peut être servi à la
restauration d'une partie endommagée). La datation de la
première moitié du Xe siècle nous semble un peu
tardive. En effet, la ressemblance entre cet édifice et la
chapelle d'Aix fait envisager une date similaire entre les
deux édifices. Or la chapelle d'Aix est réputée être
l'église de Charlemagne qui a vécu aux alentours de l'an
800, donc au début du IXe siècle. Charlemagne
aurait fait venir d'Orient une insigne relique : la chape
portée par Jésus-Christ lors de la Passion. Et il l'aurait
fait déposer dans son église qui a pris le nom de « chapelle
». En admettant que cette histoire est exacte, on doit aussi
admettre que la chapelle d'Aix est au moins contemporaine à
l'arrivée de la chape. Elle est même peut-être antérieure.
Il est fort probable en effet que l'essor de la région
d'Europe qui contenait la communauté franque (actuellement
la Belgique, la Champagne, le Sud des Pays-Bas et la
Rhénanie) ait débuté bien avant l'avènement de Charlemagne.
Il est donc possible que la rotonde d'Aix soit antérieure à
Charlemagne.
Datation envisagée
pour l'église Saint-Donatien de Bruges : an 850 avec un
écart de 100 ans.